#InstantDiasporaBurkinabè : Davy Darankoum, le doctorant qui souhaite enseigner l’intelligence artificielle

Davy Darankoum est un doctorant en Intelligence artificielle au laboratoire de Mathématiques-Informatique de Grenoble en France. Passionné, il ambitionne l’enseigner et la mettre au profit du système de santé de son pays.

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Davy Darankoum, doctorant en Intelligence artificielle
  • ⁠ ⁠Présentez- vous à nos lecteurs

 Je me nomme Davy Darankoum. Je suis burkinabè et doctorant en Intelligence artificielle au laboratoire de Mathématiques-Informatique de Grenoble en France.

  • Quel est votre parcours scolaire ?

Mon parcours scolaire démarre à l’école maternelle et primaire Kandara, sis à Pissy, quartier de la ville de Ouagadougou. J’y cheminerai jusqu’à l’obtention de mon certificat d’étude primaire. Je poursuis mes études secondaires au Complexe Scolaire Sainte Famille. Comme l’indique sa devise « Discipline – Travail – Fraternité », les sept années passées dans cet établissement m’ont permis de consolider chacune de ces valeurs. Après l’obtention de mon baccalauréat, j’obtiens une admission à l’Institut Universitaire Technologique de Metz, en France. J’y ai passé deux années qui m’ont permis d’obtenir un DUT (Diplôme Universitaire Technologique) en Statistique et Informatique. Ensuite, j’ai passé trois (03) années à Lyon au cours desquelles j’ai obtenu une Licence puis un Master en Data Science (Science des données). C’est une filière qui résulte de la symbiose entre les Mathématiques, les Statistiques et l’Informatique. Aujourd’hui, je continue mes études dans le cadre d’une thèse en Intelligence Artificielle à Grenoble.

  • Depuis combien de temps êtes-vous en France et Pour quelle raison ?

 J’étudie en France depuis sept (07) ans. Dès la classe de seconde, j’envisageais la poursuite d’une carrière en tant que Statisticien. L’idée d’extraire des connaissances à partir des données afin d’accompagner dans la prise de décision m’a toujours fascinée. Cependant, avec l’accroissement de l’activité sur le web et l’explosion des données disponibles, le métier de Statisticien tel qu’il était connu autrefois n’était plus suffisant. Il fallait associer les prouesses en traitement de l’information de grande quantité avec les connaissances et théories statistiques pour tirer le meilleur des données. C’est alors qu’avec le conseil de quelques professeurs au Burkina, j’ai candidaté pour une formation combinant à la fois les Statistiques et l’Informatique en France.

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  • Aujourd’hui Doctorant en Intelligence Artificielle suivant un partenariat entre le laboratoire math-info de Grenoble et SynapCell, pourquoi le choix de cette filière ?

Je nourrissais l’ambition au départ d’être Statisticien. Cependant, face à l’accroissement des données à analyser, l’utilisation seules des méthodes statistiques « classiques » devenait une tâche laborieuse. C’est pour faire face à ce challenge qu’est né le métier de Data Scientist qui est une fusion des statistiques et de l’informatique. Le métier de Data Scientist est tout simplement une évolution du métier de Statisticien, ce qui explique la poursuite de ma formation dans un Master en Data science. La complexité des questions auxquelles nous tentons de répondre en analysant les données n’a cessé de grandir.

Les méthodes combinant les statistiques et l’informatique se retrouvent parfois impuissantes face à certaines problématiques.

L’intelligence artificielle qui a été créée à l’origine pour réaliser des tâches extrêmement complexes longtemps attribuées à la seule capacité de l’être humain, se place progressivement comme une alternative face à l’impuissance des techniques nées des statistiques et de l’informatique. 

La maîtrise des techniques de développement d’intelligences artificielles pour tout Data Scientist souhaitant perfectionner son art est une nécessité.

Le sujet de ma thèse porte sur le développement de modèles d’intelligence artificielle pour aboutir à la prédiction des effets thérapeutiques de médicaments conçus pour les maladies du cerveau. Le but est d’obtenir une intelligence artificielle capable de donner un pronostic sur l’efficacité d’un médicament très tôt dans la phase de conception. Ce qui permettra de réduire les temps et coûts de développement.

L’intelligence artificielle est là pour nous aider à tirer un meilleur profit de la richesse des données, tout en favorisant l’extraction de connaissances pertinentes à la prise de décision. Cependant, pour créer un outil à base d’intelligence artificielle, capable de réaliser de telles prouesses, il faut énormément de données de qualité. C’est dans ce cadre que je réalise ma thèse en partenariat avec l’entreprise de biotechnologie du nom de SynapCell qui nous fournit les données dont nous avons besoin au laboratoire pour le développement de cette intelligence artificielle.

  • Comment avez-vous bénéficié de cette formation en France ?

J’ai obtenu mon admission en première année de DUT en passant par la plateforme Campus France. Pour ce qui est de la thèse, un stage au préalable passé dans l’entreprise de biotechnologie (SynapCell) m’a permis de garder de bonnes relations qui ont conduit à la proposition de cette offre de doctorat.

  • Comment s’est faite votre intégration en France ?

Mon intégration a été des plus simples. À mon arrivée dans la ville de Metz, j’ai trouvé une grande communauté d’étudiants et travailleurs burkinabè. Ils m’ont aidé à vite trouver mes repères et à m’adapter dans ce nouvel environnement. Pour ce qui est des études, je me suis retrouvé dans une classe comprenant diverses nationalités. Nous avons appris de la richesse culturelle des uns et des autres et cette formation que l’on partageait a réussi à nous rassembler et faciliter nos échanges.

  • Quels ont été vos défis au quotidien ?

Le premier défi auquel j’ai été confronté c’est l’informatique. La formation en France intègre l’instruction de notions de base en informatique dès la classe de seconde, ce qui n’était pas le cas à cette période au Burkina. Mon niveau dans cette discipline était très faible et il m’a donc fallu mettre les bouchées doubles pour être au niveau. Un autre défi que j’ai affronté et qui continue aujourd’hui est celui de l’évolution croissante du métier de Data Scientist. C’est un métier dans lequel, il faut perpétuellement être en apprentissage car d’une année à une autre de nouvelles techniques émergent et il faut se mettre à jour. C’est à la fois un défi et une passion parce qu’on n’en a jamais fini et c’est donc très difficile de s’ennuyer en Data Science – Intelligence Artificielle.

  • L’étudiant burkinabè a bonne presse en France, le confirmez-vous ?

Oui, cela est indéniable. Je l’ai vécu directement car j’ai intégré une formation de Master dans laquelle un burkinabè faisait partie des majors et je connais bien d’autres exemples. Cependant, il ne faut pas se reposer sur ses lauriers. On peut aller encore plus loin tout en visant plus l’excellence. Je peux vous assurer qu’il existe bon nombre de domaines clés dans lesquels nous sommes sous-représentés.

  • Comptez-vous rentrer au pays après l’obtention de ce diplôme ou cherchez-vous plutôt à vous établir en France ?

Je répondrai toujours présent s’il s’agit d’apporter ma petite pierre à la construction du Burkina. D’ailleurs l’une des raisons qui m’ont poussées à réaliser une thèse est la possibilité de pouvoir un jour enseigner dans les universités burkinabè.

Pour l’instant, je me focalise dans l’expansion de mes compétences et la recherche d’expériences qui me permettront de les consolider. Cette opportunité m’est donnée aujourd’hui en France. Je ferai un choix en fonction des opportunités qui se présenteront à moi à l’issue de mon doctorat.

  • Quels sont vos projets pour le Burkina ?

Mon premier projet pour le Burkina, comme déjà abordé, est l’enseignement. L’intelligence artificielle se place aujourd’hui (mais de moins en moins) comme une technologie difficile d’accès dans les pays en développement. Je reste cependant convaincu que bon nombre de problématiques au Burkina pourraient trouver leur solution dans le développement de modèles d’intelligence artificielle. J’aimerais plus tard contribuer à l’expansion des connaissances des étudiants burkinabè dans ce domaine. Aujourd’hui, le Centre de recherche en Intelligence Artificielle (CITADEL) basé à Ouagadougou œuvre déjà en la matière et j’en profite pour féliciter leur leadership.

Le deuxième projet serait la mise en place d’une solution IA pour accompagner le système de santé au Burkina. Je l’ai tantôt mentionné, pour créer une IA de qualité il faut des données de qualité et en quantité. C’est fondamental et on ne peut passer outre cette étape (pour l’instant). Je nourris l’ambition de mettre en place un projet de collecte de données de manière décentralisée tout en se rapprochant des professionnels de la santé afin d’identifier les problématiques clés auxquelles ils font face et qui peuvent trouver leurs réponses dans l’IA. Un tel projet ne pourra jamais voir le jour si les premiers concernés n’y voient pas d’utilité. Une fois cette étape réalisée, des modèles d’IA pourraient voir le jour grâce aux données collectées et ainsi fluidifier la prise en charge médicale au Burkina.

  • Quels sont vos souhaits pour le Burkina ?

Mon premier souhait pour le Burkina, c’est de parvenir à éradiquer le terrorisme qui met tant à mal la population. Je ne pourrai poursuivre sans présenter mes humbles hommages à toutes ces femmes et hommes qui se battent pour faire affront à cette tragédie. Je rends également hommage à toutes nos forces de sécurité tombées au front.

Je souhaite au Burkina de se relever plus fort qu’il ne l’a jamais été, à travailler pour une meilleure décentralisation des biens et services et à incarner en tout point sa signification : pays des Hommes intègres.

Interview réalisée par Mireille Sandrine Bado/MoussoNews

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