Alimatou Sontié : La reine du bandji de Bérégadougou
Dans la petite ville de Bérégadougou, niché au cœur de la région des Cascades se trouve un véritable trésor : le bandji d’Alimatou Sontié. Cette boisson traditionnelle, obtenue par la fermentation naturelle de la sève de rôniers est une fierté locale qui attire des amateurs de partout dans le pays. Mousso News est allée à la rencontre de cette entrepreneure dans son hangar de fortune.
Depuis plus de 25 ans, Alimatou Sontié, 56 ans, a fait du commerce de bandji son gagne-pain. Une vocation qu’elle a embrassée dès son plus jeune âge, guidée par les pas de son grand-père qui était lui-même un producteur réputé. « J‘ai grandi entourée par cette activité. Je peux dire que c’est mon père qui m’a transmis tous les secrets du bandji. Mon grand-père était aussi un grand extracteur de bandji. Quand il amenait sa récolte, nous, nous étions chargées de la vendre », raconte-t-elle avec fierté.
Une passion
Aujourd’hui, Alimatou est devenue une véritable entrepreneuse, gérant avec brio son affaire familiale. Chaque jour, elle sillonne les villages environnants pour s’approvisionner en sève fraîche auprès des récoltants. « C’est un travail physique, mais je le fais avec passion. Il faut souvent faire de longs déplacements pour avoir la marchandise. Dans le passé, le bandji était extrait ici même sur des rôniers à Bérégadougou. Mais maintenant, les jeunes ne le font plus. Les vieux aussi sont fatigués avec le poids de l’âge. Nous sommes donc obligés d’aller chercher ailleurs », confie-t-elle.
Pourquoi certains bandji sont de mauvaise qualité ?
Selon Alimatou, beaucoup d’extracteurs sont aujourd’hui attirés par l’argent, ce qui fait baisser la qualité du produit de certaines vendeuses. « Beaucoup d’ extracteurs ne respectent plus les règles. Certains sont malhonnêtes. Ils sont capables d’ajouter de l’eau dans la boisson afin d’avoir plus d’intérêts. Cala joue énormément sur nous les commerçantes parce que le client, quand il prends ça, le goût n’est pas authentique et ça le déçoit », explique-t-elle. Pour éviter toutes ces incompréhensions et fidéliser sa clientèle, Alimatou a décidé d’être fidèle à trois producteurs auxquels elle a une confiance absolue. Et depuis lors, elle n’est pas déçu. Les clients aussi le sont encore moins.
Les clients sont satisfaits de la qualité
« C’est un produit tellement unique et savoureux. On ne peut pas s’en passer. Chaque jour, avant de commencer mes activités, je passe prendre 1 litre et je continue. Cela m’aide énormément. Je ne sais comment elle fait, mais son bandji est complètement différent des autres », s’exclame Armand Sawadogo, un client de 46 ans.
Le bon bandji, affirme Armand. Sawadogo, est de couleur blanche foncée avec une bonne quantité de mousse. Armand n’est pas le seul a reconnaître la qualité du bandji de Alimatou. « Quand je viens ici, c’est toujours un moment de pur plaisir. Alimatou nous accueille avec le sourire et on repart avec nos bouteilles bien remplies. Chaque jour je viens ici. Même quand je reçois des invités, j’envoie les enfants chercher quelques litres pour leurs faire plaisir », renchérit Zesouma Sanou, un autre habitué du coin.
En plus de ceux qui consomment le bandji sur place dans le petit hangar de Alimatou, il y a ceux qui viennent s’en procurer pour les événements culturels. « A Bérégadougou ici, le bandji est ancré dans la tradition. Que ce soit lors des mariages ou des funérailles, il faut obligatoirement le commander pour les invités et la tradition. Pour que tout le monde y trouve son compte, il faut venir chez notre maman, Alimatou », souligne Martin Sourabié, un jeune homme dans la vingtaine d’années.
150 FCFA le litre
Chez Alimatou Sontié, le litre du bandji est à 150 FCFA. Sans donner de précision, la commerçante avoue que le business est très rentable et lui permet d’être indépendante financièrement. Malgré ce succès, Alimatou fait face à quelques défis. « La récolte du bandji est aléatoire selon les saisons. Pendant la saison des pluies, le bandji n’est pas aussi sucré qu’en saisons sèche. Ce qui fait que les ventes diminuent considérablement à cette période », explique-t-elle.
Aussi, elle souligne le fait que beaucoup de personnes prennent du bandji en crédit. Certains dit-elle, refusent même de payer les dettes qu’ils contractent. Une autre difficulté est la baisse croissante du nombre d’extracteurs. « Les jeunes n’aiment plus ce travail. Beaucoup ont opté pour l’école moderne. Si rien n’est fait, je crois que dans quelques années, quand les vieux seront totalement équipés, il n’y aura plus quelqu’un pour grimper sur les rôniers et extraire cette boisson naturelle », s’inquiète-t-elle.
Ambition d’élargir la clientèle
Son plus grand souhait serait d’élargir sa clientèle. « J’aimerais pouvoir toucher un public encore plus large et faire découvrir notre délicieux bandji à travers tout le pays et pourquoi pas l’exporter. Il faut dire déjà que nous exportons dans plusieurs villes du Burkina. Certains clients nous contacte et nous leurs expéditions à travers les compagnies de transport », confie-t-elle.
À l’endroit des jeunes filles, Alimatou les invite à suivre leurs passions et à chercher à gagner dignement leurs vies.
Léandre Sosthène SOMBIE/ Mousso News Bobo-Dioulasso