Après le deuil : Parcours de combattant du remariage pour des femmes

Au Burkina Faso, le remariage des veuves reste un sujet complexe qui mêlent traditions, pressions sociales et désirs personnels. Malgré les défis culturels persistants, de nombreuses veuves cherchent à reconstruire leur vie après le deuil, défiant ainsi les normes établies.

Le remariage des veuves au Burkina Faso demeure un parcours semé d’embûches où les traditions et les préjugés sociaux jouent un rôle important. Pourtant, de plus en plus de femmes, après avoir perdu leur conjoint, aspirent à une seconde chance en amour et à une vie épanouie.

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Photo de l’Agence d’Information du Burkina(AIB)

C’est le cas de Joséphine Savadogo (nom d’emprunt) qui est confrontée à plusieurs difficultés. Veuve et mère de deux enfants, la trentaine révolue, cette jeune femme depuis le décès de son défunt époux en 2010 n’a plus parlé de remariage à cause des pressions sociales et familiales.

En effet, Joséphine doit fidélité à son mari même après la mort selon les pratiques coutumières de sa famille. « Après des années de veuvage, j’ai décidé de rechercher à nouveau l’amour. Mais nos traditions sont strictes. Je suis pressée de rester fidèle à la mémoire de mon défunt mari. Cela limite mes options et complique mes chances de trouver un compagnon compatissant », explique-t-elle avec un grand soupire et d’ajouter avoir accepté la situation pour garantir un avenir à ses enfants.

Comme elle, Aïssata Kaboré (nom d’emprunt) âgée de 37 ans a perdu son mari en 2019. 5 ans après son veuvage, il est difficile pour elle de trouver un compagnon compréhensif. « Après la perte de mon mari, j’ai pensé que le remariage pourrait m’apporter du réconfort. Mais être veuve signifie souvent être considérée comme ‘malchanceuse’. Les hommes hésitent à s’engager avec une femme déjà mariée. Cela rend difficile de trouver quelqu’un prêt à accepter ma situation et celle de mes enfants », témoigne-t-elle triste.

Amina Bolly (nom d’emprunt), 35 ans a connu deux fois le veuvage. Mariée à 16 ans, son premier amour décède 4 ans après son union. A la mort de ce dernier, comme il est de coutume dans certaines cultures du Burkina Faso, elle se remarie au frère de son défunt époux et le lévirat est consommé.

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Image illustrative

Une dizaine d’années après son second mariage, son nouveau mari meurt suite à un malaise. Depuis, le veuvage de Amina perdure car dit-elle « Après le décès de son second mari, je ne me suis plus mariée car cela est très compliquée ».

Suite aux différents décès de ses conjoints, aucun n’autre membre de la famille n’ose prendre de risque, à cause de la règle non écrite qui voudrait qu’il n’y ait pas deux sans trois. Mais surtout à cause des médisances sur sa situation.

Les mauvaises langues lui attribuent une espèce de malchance ayant le pouvoir d’abréger la vie de ses conjoints. « Les gens autour de moi disent que je suis possédée d’un génie jaloux qui a le pouvoir de tuer mes conjoints pour me garder uniquement pour lui. J’ai été tellement affectées par ces commérages que j’ai pris la décision de ne plus me remarier et de me concentrer sur l’avenir de mes enfants », déplore-t-elle.

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Image d’illustration

Le Fatwa des religions

Contrairement à certaines pratiques culturelles, le remariage semble être admis et autorisé par les différentes religions au Burkina Faso.

Selon Lassané Sakandé, imam au Cercle de réflexion et de formation islamique (CERFI), l’islam encourage cette pratique. La jeune femme qui a perdu son époux a la possibilité de se remarier après 4 mois 10 jours de veuvage si elle le désire. Ce remariage peut être fait avec un membre de la famille (frère du défunt) si elle le veut ou une autre personne externe à la famille. « Quand la femme perd son époux, elle peut se remarier après un temps donné et cela est même encouragé par l’islam », explique-t-il.

Tout comme l’islam, le christianisme n’est pas contre le remariage des veuves. La Bible non seulement n’interdit pas le remariage après la mort du conjoint, mais dans certains cas, elle l’encourage même. « A ceux qui ne sont pas mariés et aux veuves, je dis qu’il est bien pour eux de rester comme moi. Mais s’ils ne peuvent pas se maîtriser, qu’ils se marient, car il vaut mieux se marier que de brûler de désir », recommande l’apôtre Paul dans le premier livre aux corinthiens au chapitre 7.

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Crédit photo: Missionnaires d’Afrique

Aussi, la plupart des vœux de mariage contiennent toujours l’expression : « jusqu’à ce que la mort nous sépare ». Cette expression n’est pas tirée directement de la Bible, mais elle exprime un principe biblique. Celui de l’apôtre Paul toujours dans son premier livre aux corinthiens au chapitre 7 ou il précise « qu’une femme est liée aussi longtemps que son mari est vivant ; mais si le mari meurt, elle est libre de se marier à qui elle veut ; seulement, que ce soit dans le Seigneur ».

Le remariage représente un défi très complexe pour de nombreuses veuves au pays des Hommes Intègres. Malgré les enseignements religieux qui peuvent parfois soutenir cette pratique, certaines normes communautaires strictes et la stigmatisation sociale peuvent rendre cette étape difficile.

Mireille sandrine Bado/MoussoNews

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