Bobo-Dioulasso : ces femmes PDI qui refusent de s’adonner à la mendicité
La crise sécuritaire du Burkina Faso a entraîné le déplacement de plus de 2 millions de personnes qui sont accueillies au niveau des villes. Sans issue, la plupart de ces personnes s’adonnent à la mendicité afin de survivre. A Bobo-Dioulasso, d’autres refusent cet assistanat et décident de travailler la terre pour survivre. Mousso News est allé à la rencontre de ces braves dames dans leur exploitation à quelques kilomètres de la ville.
Il est 10h à Farakoba situé à quelques kilomètres de Bobo-Dioulasso). Après quelques minutes de route, nous sommes enfin sur le lieu du rendez-vous. À l’affiche, une centaine de femmes réparties en plusieurs sous-groupes. Équipées de dabas, certaines sont en pleine opération de sarclage dans le champs d’arachide, pendant que d’autres s’attèlent à épandre l’engrais sous les pieds de maïs. Les éclats de rires et les petites anecdotes se racontent ça et là. L’ambiance est le quotidien ici, confie notre guide. Nous sommes exactement au champs des déplacées interne de la ville de Bobo-Dioulasso. Venues de divers horizons et aux histoires diversifiées, elles sont désormais unies par le travail de la terre. Après avoir été chassées de leurs localités d’origines par les terroristes, ces femmes ont trouvé refuge à Bobo-Dioulasso. À leurs arrivées dans la capitale économique du Burkina Faso, elles étaient livrées à elles-mêmes, sans source de revenus. Leur travail consistait à mendier au niveau des feux tricolores afin de gagner leur pain quotidien.
Solange Traoré, la ” Messi”
”Ces femmes peuvent sortir de la mendicité” murmurait avec conviction Solange Traoré à chaque fois qu’elle les percevait dans les rues. Cette coordonnatrice des organisations féminines de la région des Hauts-Bassins murit donc l’idée de les regrouper et de chercher des terres cultivables pour elles. “En tant que responsable de femmes, et vue la situation actuelle des personnes déplacées internes, qui sillonnent la ville de Bobo-Dioulasso, nous on a jugé bon de les aider. Nous sommes allés voir l’école nationale de l’agriculture de Farakoba (ENAFA), pour avoir des terrains. C’est ainsi que l’an passé, elle nous a donné 5 hectares que nous avons loué à raison de 5000 FCFA l’hectare. Les femmes ont cotisé et on a commencé à travailler. Mais cette année, ayant vu les résultats de l’année dernière, ils nous ont donné plus de 10 hectares sans frais de location“, explique Solange Traoré. Elle affirme que ces femmes ont décidé de laisser derrière elles la mendicité pour se tourner vers l’agriculture.
Une centaine de femmes déplacées interne
Selon Solange Traoré, plus d’une centaine de femmes ayant laissé derrière elles tout ce qu’elles possédaient, sont désormais accueillies dans ce champs. “Si nous venons au champs et que nous devons passer toute la journée, nous cuisinons sur place et nous mangeons tous ensemble“, confie la coordonnatrice. Elle précise que ces femmes, ainsi que leurs enfants, sont tous recensées par l’action sociale. Aujourd’hui, Mme Traoré est fière de savoir que ces femmes subviennent à leurs besoins en travaillant la terre, plutôt qu’en dépendant de la charité publique.
Le ”champ de la paix” pour le bien-être psychologique des femmes
Dans cette exploitation de plus de 10 hectares elles produisent du maïs, des arachides, du niébé, du gombo et bien d’autres spéculations. En hommage à la bonne humeur qui règne sur le site, les femmes ont décidé de baptiser le champs, “champs de la paix”. La présidente d’ajouter que cette initiative de ces braves femmes a été bien accueillie par le gouvernement de Transition qui a décidé de les donner des semences et des intrants de façon gratuite. Aussi, les femmes bénéficient de l’accompagnement de la Direction régionale de l’agriculture, en appui conseil permanent. Solange Dabiré souligne l’importance de cette initiative non seulement pour le bien-être économique des femmes déplacées internes, mais aussi pour leur bien-être psychologique. Elle affirme que cette nouvelle occupation leur permet de retrouver un sentiment d’autonomie et de dignité, tout en favorisant leur réinsertion dans la société.
Un sentiment de joie pour les femmes
Les femmes déplacées internes ont accueilli cette opportunité avec enthousiasme et détermination. C’est le cas de Aïchata Zoromé. Elle a fui la menace terroriste à Titao pour se retrouver à Bobo-Dioulasso en 2022. Aujourd’hui, elle est fière d’appartenir à cette association. “C’est le terrorisme qui m’a fait quitter Titao avec mes enfants. À notre arrivée, c’était difficile. Dès qu’on m’a parlé de cette association et de ce qu’elle fait, je n’ai pas hésité à rejoindre. Je suis contente et cette activité est mieux que la mendicité “, reconnait-t-elle. A l’entendre à travers ce champs, la vie peut se gagner dignement. Elles invite celles qui sont toujours dans la rue à se joindre à elle. Comme Aïchata Zoromé, Mariama Konaté est aussi contente de sortir de l’assistanat. Elle remercie particulièrement les responsables de l’association qui l’ont permis de rejoindre l’équipe.
Certains déplacés préfèrent la mendicité au travail de la terre
Si certaines adhèrent facilement à ce travail de la terre, d’autres par contre se plaisent à jamais dans la mendicité, déclare Mme Traoré. “Même ce matin, quand je venais au champs, j’ai invité des femmes déplacées qui étaient au niveau du rond-point, à venir s’ajouter à nous, mais elles ont catégoriquement refusé“, regrette Solange Traoré. Selon elle, si le gouvernement ne fait pas quelque chose dès à présent, les enfants qui accompagnent leurs génitrices au niveau des feux seront des futurs problèmes pour la société. “Si après, on ne les donne plus rien dans la rue, ces enfants qui ne savent rien faire comme travail se retourneront contre les populations. Ils peuvent être tenté à joindre la délinquance“, prévient la coordonnatrice des associations féminines.
Un forage pour produire toutes les deux saisons de l’année
Son rêve est de permettre aux femmes de vivre dignement. Elle entend faire des demandes pour qu’à l’avenir, on les offre des forages afin qu’elles produisent pendant toutes les deux saisons de l’année. L’histoire de ces femmes déplacées internes qui abandonnent la mendicité pour travailler la terre est un exemple frappant du courage et de la résilience humaine face à l’adversité. Grâce à l’initiative de Solange Traoré et au soutien des autorités locales, elles retrouvent l’espoir et la confiance en un avenir meilleur.
SLS/ Mousso News Bobo-Dioulasso