Burkina Faso : Entre chocs climatiques et adaptation résiliente
Sécheresses dévastatrices, inondations catastrophiques et invasions acridiennes. Ces aléas climatiques rythment la vie des Burkinabè et menacent la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance de millions de personnes. Au cœur de cette adversité, se dessinent des initiatives de résilience et d’adaptation, portées par des communautés déterminées et des stratégies innovantes.
Les sécheresses, les inondations et les invasions acridiennes récurrentes sont les principaux risques naturels qui affectent le Burkina Faso. La dépendance de l’agriculture vis-à-vis des précipitations rend ces phénomènes particulièrement dévastateurs pour la production agricole et la sécurité alimentaire.
En septembre 2009, une pluie exceptionnelle a causé des inondations dévastatrices, touchant 11 des 13 régions du pays. Les dégâts humains, matériels et économiques se sont élevés à plusieurs milliards de francs CFA, révélant l’ampleur des vulnérabilités climatiques du pays.
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En une seule journée, la capitale Ouagadougou a enregistré 263,4 mm de pluie, soit près du tiers de la moyenne pluviométrique annuelle du pays qui varie entre 800 et 900 mm.
Ces inondations ont causé des pertes humaines avec 46 décès, 63 blessés et environ 119 356 sinistrés. Les dégâts matériels incluaient la destruction de 14 000 latrines, l’arrêt de la station de traitement d’eau potable de Paspanga pendant 10 jours, et des dommages significatifs aux infrastructures routières et hydro-agricoles.
Les pertes économiques ont été évaluées à 15 032 000 000 CFA (33 millions USD), et les besoins financiers pour la reconstruction ont été estimés à 119 670 000 000 CFA (266 millions USD).
Les sécheresses chroniques accélèrent la déforestation et la désertification, aggravant ainsi la pauvreté et l’insécurité alimentaire. La perte et la modification des écosystèmes dues à l’avancée du Sahel, à la déforestation et aux mauvaises pratiques agricoles et pastorales réduisent progressivement la productivité économique des activités rurales.
Les ménages adoptent des stratégies de prévention et d’adaptation, telles que la diversification des cultures et l’extension des superficies cultivées, pour faire face aux chocs exogènes.
Les systèmes d’exploitation des terres
Le système traditionnel d’exploitation des terres, comme la polyculture et la culture intercalaire, est courant. Ces pratiques permettent aux ménages ruraux de diversifier leurs cultures et de choisir des variétés à faible rendement mais stables, réduisant ainsi les risques liés aux chocs climatiques.
Malgré une pluviométrie annuelle moyenne inférieure à 600 mm dans la zone sahélienne, les agriculteurs réussissent à maintenir une certaine stabilité de production grâce à ces méthodes.
Conscient de l’ampleur du réchauffement climatique, le Burkina Faso a ratifié la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques en 1992.
Le pays a élaboré et mis en œuvre un Programme d’Action National d’Adaptation (PANA) qui intègre une approche participative et prend en compte l’aspect genre et la synergie avec les actions en cours.
Le PANA s’inscrit dans les priorités de développement économique et social du Burkina Faso, visant à réduire la vulnérabilité aux impacts climatiques.
Le Burkina Faso, en tant que membre des pays les moins avancés (PMA) et parmi les plus vulnérables aux changements climatiques, a soumis sa première communication nationale et adopté une stratégie nationale de mise en œuvre.
Les projections climatiques indiquent une augmentation des températures moyennes de 0,8°C d’ici 2025 et de 1,7°C d’ici 2050, ainsi qu’une diminution de la pluviométrie de 3,4 % en 2025 et de 7,3 % en 2050.
Ces changements prévoient une réduction du volume d’eau annuel écoulé de la Comoé et du Mouhoun, aggravant ainsi les défis en matière de gestion des ressources en eau.
Transition énergétique
L’énergie tirée du bois demeure une source majeure de combustible pour la cuisine, particulièrement en milieu rural. Malgré une légère baisse de l’utilisation des combustibles solides au profit du gaz et du solaire, les ménages ruraux continuent de dépendre fortement du bois de feu et du charbon de bois. Cette dépendance contribue à la dégradation des écosystèmes forestiers et à la perte de biodiversité.
En 2018, 98,9 % des ménages ruraux utilisaient encore des combustibles solides pour la cuisine, contre 57,5 % des ménages urbains. Bien que la proportion des ménages utilisant ces combustibles ait diminué de 91,8 % en 2010 à 86,0 % en 2018, le bilan énergétique du pays reste dominé par les combustibles solides. La transition vers des sources d’énergie plus durables, comme le gaz et le solaire, est essentielle pour réduire la pression sur les écosystèmes forestiers.
Le Burkina Faso dispose d’une bonne base de données climatologiques avec des observations remontant à 1902 pour certains paramètres météorologiques. Du fait de sa position géographique, son climat est de type tropical à dominance soudano-sahélienne, caractérisé par l’alternance entre une courte saison de pluies et une longue saison sèche. La continentalité du pays et sa position à la lisière du Sahara prédisposent les éléments du climat à une forte variabilité diurne et annuelle.
Les différentes zones climatiques
On distingue traditionnellement trois zones climatiques : la zone sahélienne au nord avec une pluviométrie moyenne annuelle inférieure à 600 mm, la zone nord soudanienne au centre avec une pluviométrie moyenne annuelle comprise entre 600 et 900 mm, et la zone sud soudanienne au sud avec une pluviométrie moyenne annuelle supérieure à 900 mm et une saison des pluies de près de 6 mois.
Les tendances climatiques montrent une augmentation des températures moyennes et une régression de la pluviométrie. Les modèles climatiques prévoient une augmentation des températures de 0,8°C d’ici 2025 et de 1,7°C d’ici 2050, accompagnée d’une diminution de la pluviométrie de 3,4 % en 2025 et de 7,3 % en 2050.
Ces projections indiquent également une diminution du volume d’eau annuel écoulé de la Comoé et du Mouhoun, alors que les volumes d’eau des bassins du Nakambé et du Niger pourraient augmenter en raison de la diminution des infiltrations au profit des ruissellements.
Les effets des changements climatiques
Il est difficile de dissocier les effets de la variabilité et des changements climatiques de ceux des facteurs anthropiques. Cependant, durant les quatre dernières décennies, les phénomènes climatiques extrêmes (sécheresses, inondations, vents de sable, pics de température) sont devenus plus fréquents et plus intenses, constituant de véritables catalyseurs de la dégradation du milieu biophysique.
Les sécheresses des années 1970 ont provoqué un manque d’eau et une famine qui ont entraîné de nombreuses pertes en vies humaines, la décimation du cheptel et de la faune, aggravant ainsi la pauvreté. En dépit des efforts de lutte contre la désertification, les sécheresses récentes continuent d’accélérer la déforestation et la désertification.
La variabilité pluviométrique et le changement climatique sont donc l’une des principales causes de la dégradation des écosystèmes au Burkina Faso, affectant sévèrement les systèmes de production végétale et les systèmes d’élevage.
Les tendances actuelles montrent une augmentation des températures et une diminution des précipitations qui exacerbent les défis en matière de gestion des ressources naturelles et de développement durable.
Le Burkina Faso, par sa position géographique et ses conditions climatiques extrêmes, reste particulièrement exposé aux effets néfastes des changements climatiques. Les efforts pour améliorer la résilience face à ces défis passent par l’adoption de stratégies d’adaptation intégrées et la promotion de pratiques agricoles et énergétiques durables.
En conjuguant les efforts des acteurs locaux, des partenaires techniques et financiers, et des politiques nationales, le pays peut espérer atténuer les impacts climatiques et assurer un développement plus durable pour ses populations.
La mise en œuvre de programmes tels que le PANA, combinée à une transition énergétique vers des sources plus durables, est essentielle pour renforcer la résilience du Burkina Faso face aux chocs climatiques.
Rodrigue SEKONE