Burkina : profession, “écailleuses ” de poissons
Installées à l’angle d’une des poissonneries de la ville de Koudougou, région du Centre-ouest du Burkina, un groupe de femmes s’affairent au nettoyage de poissons. Ces écailleuses soulagent les ménagères d’une corvée. C’est avant tout pour elles, une activité génératrice de revenus.
Pour survivre et subvenir aux besoins de leurs familles, des « écailleuses » communément appelées, ‘’les arrangeuses de poissons’’, exercent cette activité depuis près d’une dizaine d’années. Enlever les écailles, retirer les entrailles, couper les parties non consommables des poissons est le quotidien de ces femmes.
Munies d’un couteau, d’une brosse et une éponge, elles sont installées à l’angle de la poissonnerie. Presque mécaniquement, elles nettoient avec rapidité, précision et efficacité les poissons. Pas moins de 30 cartons passent entre leurs mains par jour.
Léa, 25 ans, semble être la plus jeune du groupe. Mère de 2 enfants, elle mène cette activité depuis 2017. Enfant au dos, la jeune mère est à la tâche. « Je fais ce petit boulot car je refuse d’être une charge pour autrui. Depuis l’adolescence, je fais de petites activités pour me nourrir. Aujourd’hui avec mes enfants il est encore difficile mais je fais ce boulot peu rémunérateur en attendant de réunir un fond pour faire du commerce » explique-t-elle, entre deux poissons écaillés.
Un nouveau métier dans le secteur informel
Auparavant, le nettoyage des poissons n’était pas vu comme un métier ni comme une activité pouvant générer un revenu. C’était plutôt une tâche domestique. Les femmes achetaient les poissons et les nettoyaient une fois au domicile. Par contre aujourd’hui, cette activité est devenue un métier à part entière.
« Personnellement je n’aime pas arranger les poisons, ça me fatigue et je me coupe toujours les doigts lorsque je le fais-moi même. Alors pour gagner en temps, je les donne à ces femmes pour qu’elles le nettoient pour moi. C’est gagnant-gagnant. Elle, leur argent, et moi du temps » dit Marina Bakouan, une cliente des écailleuses.
Le réveil pour celles qui travaillent à la poissonnerie est de 5 h du matin afin d’être au ‘’service’’ à 6h du matin. Toutes en tant que mères de famille, elles accomplissent leurs tâches ménagères avant de prendre le chemin pour le travail. De 6h à 22h, souvent 23h selon la période de l’année, c’est le même manège.
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Un travail moins rémunérateur mais important
Ces écailleuses de poissons travaillent beaucoup pour peu. Elles ne bénéficient que d’une rémunération mensuelle de 35 000 FCFA. « Nous n’avons pas encore trouvé mieux ailleurs, sinon j’aurais laissé ce boulot depuis fort longtemps. Nous travaillons toute la journée pour un petit salaire » grogne Samira. Elle est la doyenne du groupe.
Malgré tout, elle a pu s’acheter un vélo qui lui facilite ses déplacements. « Ma maison est située loin de mon lieu de travail. Au début je quittais très tôt mon domicile mais depuis que j’ai pu m’acheter ce vélo, il m’aide beaucoup dans mes déplacements » reconnaît-t-elle. Comme Léa, Samira la doyenne ambitionne de faire le commerce quand elle aura suffisamment économisé.
Bien qu’il soit moins valorisé économiquement, ce ‘’job’’ a de l’importance dans la chaîne alimentaire. « Nous avons préféré prendre des femmes, parce qu’on trouve que c’est un métier bien adapté à elles. Elles veillent à ce que les poissons soient bien propres et soient prêts à être préparés » explique Anas, le gestionnaire de la poissonnerie où travaillent ces femmes.
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Le risque permanent
La sécurité et le bien-être des femmes qui arrangent le poisson ne sont pas garantis. Elles ne prennent aucune précaution et n’utilisent pas d’équipements de protection comme des gants, tabliers…
En plus de cela, elles sont exposées au danger à la descente quand il s’agit de regagner leurs domiciles tardivement. « Quand je quitte le boulot, j’ai tout le temps peur de me faire voler le peu d’argent que j’ai. C’est Dieu seul qui nous protège sinon rien n’est simple » confie Léa.
Par ailleurs, leur travail a un impact sur leur vie sociale et familiale car cela limite leurs interactions avec leurs proches. « Je quitte la maison quand tout le monde dort toujours, et je rentre le soir quand mes enfants dorment. Depuis que j’arrange les poissons, je n’ai plus le temps à leur accorder. Je n’ai plus le temps aussi pour moi-même. Je ne vis plus, je survis », témoigne la doyenne Samira avec tristesse.
Malgré les défis auxquels font face ces femmes, elles font preuve de persévérance, de détermination et de dévouement, pour réussir dans leur travail.
Studio Yafa avec MoussoNews