Burkina: un citoyen interpelle sur les cotisations de parents d’élèves

Monsieur le directeur régional,

Je m’en voudrais de terminer l’année sans vous adresser cette lettre sur la situation de plusieurs établissements post-primaire et du secondaire de la région tellement ma déception est grande face à votre silence coupable. Mais avant tout, je tiens à vous féliciter pour votre nomination en tant que directeur régional des enseignements post-primaire et secondaire de la région des Hauts-Bassins. Puisse le Tout pissant vous accompagner dans l’accomplissement de votre mission. Vous l’avez sans aucun doute appris à travers les rapports que vous transmettent vos collaborateurs et aussi dans les médias que les choses ne fonctionnent pas comme il se devait dans plusieurs établissements scolaires de la région.

Les Associations des parents d’élèves, structures indépendantes et partenaires des établissements sont devenues la vache laitière de quelques responsables scolaires et quelques irresponsables des bureaux APE sans aucune réaction des premiers responsables en charge de l’éducation. Je dirai même sous leur complicité (des chefs d’établissements jusqu’au Directeur régional que vous êtes).

Vu la gravité et les dimensions que prenaient les cotisations APE (ordinaires et spéciales), nous avons lu sur les réseaux sociaux les réactions de vos collègues des régions du Centre-Ouest-et des Cascades que nous saluons au passage, invitant dans des communiqués les responsables d’établissement à s’adapter aux normes dans la fixation des frais de scolarité. Pendant ce temps votre écho tarde à venir laissant ainsi les parents d’élèvent dans le néant.

Monsieur le Directeur Régional,

Cette lettre ouverte se veut une interpellation parce que les autres démarches (sensibilisation, écrits sur les réseaux sociaux) que nous avons épuisée n’ont pas porté les effets escomptés dans tous les établissements même si les choses ont beaucoup bougé au Lycée départemental de Koloko, où la hardiesse des parents d’élève conscients et lucide a abouti au rabaissement des cotisations ordinaire APE de 12500F à 5000F. Le rappel est pédagogique dit-on, la complicité de certains responsables d’établissements dans l’instauration des cotisations APE ordinaires et spéciales à l’allure d’une cotisation ordinaire est imposée aux parents d’élèves qui souffrent déjà pour prendre en charge l’éducation de leurs enfants. La fixation de ces cotisations se fait en fonction des humeurs et des calculs des proviseurs ou directeurs. Par exemple au CEG de Badara dans le Kénédougou, les parents d’élèves n’arrivent pas à faire la différence entre cotisation APE, les frais de participation et les frais de location des manuels. Sur un reçu d’un élève recruté pour complément d’effectif en classe de 6èmeau CEG de Badara on a pu constater la somme globale de 34000F prenant en compte la ténue scolaire. Selon une enquête de l’Organisation Démocratique de la Jeunesse (ODJ) publiée sur sa page Facebook, les directeurs des CEG de Guena et de Badara procédaient à l’expulsion des élèves non à jour du paiement des frais de scolarité. La même organisation (ODJ) avait dénoncé l’entêtement du directeur du CEG de Karna dans le département de Samoraguan à imposer une cotisation spéciale de 20000F pour supporter les frais de vacation et le montant trop élevé des cotisations APE au CEG du secteur 05 de Orodara.

Monsieur le Directeur Régional

Même le doyen des établissements public du Kénédougou, le Lycée Diongolo Traoré de Orodara ne déroge pas à la règle. Dans cet établissement les cotisations ordinaires APE sont fixées à 13000F malgré la circulaire de l’Union Nationale des Parents des Elèves du Secondaire et du Supérieur du Burkina (UNAPES-B) du 16 novembre 2016 invitant les APE à ne pas franchir le cap de 5000F comme cotisation ordinaire APE et la suspension des cotisations spéciales au regard des problèmes qu’elles entrainent dans le fonctionnement des APE et des établissements.

Que dire des établissements où l’APE supporte les frais de vacation depuis quatre ans sans un remboursement préalable probable ? Eh Oui, au CEG de Koloko, les parents d’élèves doivent débourser 12500F de plus sur la cotisation ordinaire APE qui est de 10000F pour supporter les frais de la vacation et pour cela l’administration serait prête à expulser les élèves. A cela s’ajoute les frais obligatoires du t-shirt et ce, chaque année. Jusqu’à ce jour des parents d’élèves continuent de s’interroger si l’Etat rembourse les frais de vacation.

Le CEG de Koloko est le deuxième établissement post-primaire après le lycée départemental dans le village de Koloko. Pendant qu’au Lycée Départemental de Koloko, certaines matières comptent deux, trois ou quatre professeurs à l’exception de Philosophie, Physique-chimie et Allemand dispensé au secondaire où il y’a un professeur par matière donnant ainsi la latitude aux professeurs de faire la vacation en dehors de Koloko, le CEG de Koloko situé à seulement 400m du lycée manque de professeurs, encourageant du même coup les parents d’élèves à se suer pour payer la vacation dans un établissement public et dans un pays où les politiques nous répètent dans les discours la gratuité de l’école. Pendant combien de temps un CEG de cinq ou six classes va-t-il continuer à spolier nos populations au vu et su des autorités ? Faut-il continuer à maintenir deux, trois ou quatre professeurs par matière dans un lycée pendant qu’un autre établissement à coté manque de professeurs ?

Monsieur le Directeur Régional,

Cette complicité des proviseurs et directeurs avec la naïveté des parents d’élèves n’est pas sans conséquences. Des abus et des surfacturations en passant par les détournements sont constatés dans les établissements post-primaires et secondaires de la région des Hauts-Bassins. Même pas la création des directions provinciales n’a pu arrêter les responsables d’établissement dans leur démarche de pillage des parents d’élèves. En effet le bimensuel d’investigation Mutation dans sa parution N°162 du 1er au 15 décembre 2018 titrait à sa Une : « Lycée Départemental de Koloko : des cotisations APE illégales sous forte odeur de détournement » dans cet établissement situé dans la province du Kénédougou, les détournements sont devenus une règle. Plus de 1 000 000FCFA destiné à organisation de l’examen blanc au cours de l’année scolaire 2017-2018 ont été détournés à d’autres fins précisément à l’électrification des salles des classes sans l’avis des parents d’élèves. Selon le journal, l’argent de l’APE aurait servi à acheter une imprimante au préfet du département, à participer aux évènements heureux et malheureux, à confectionner des t-shirt pour les professeurs qui ignoraient cette initiative à tout point de vue. Pire, une cuisine de 8 tôles a été construite à plus de 600000FCFA.

Monsieur le Directeur Régional

Parlant de la gratuité de l’enseignement, le Premier ministre Paul Kaba Thiéba dans sa Déclaration de Politique Générale (DPG) du 05 février 2016 a estimé que la priorité accordée à l’éducation nationale répond à une exigence de justice sociale et de lutte contre les inégalités avant d’ajouter : « pour atteindre cet objectif, le gouvernement établira progressivement la gratuité de l’enseignement jusqu’à 16 ans ». On pourrait dire que c’est dans ce contexte que l’arrêté conjoint MENA/MINEFID du 12 février 2018 portant fixation des frais d’inscription, et de participation des élèves, au fonctionnement des établissements d’enseignement secondaire, d’abonnement et de location des manuels scolaire à la bibliothèque et l’affectation des recettes maintient les frais d’inscription de participation de 2500F à 15000F. Selon l’arrêté la gratuité interviendra à partir de la rentrée 2020-2021.

Peut-on atteindre cet objectif si les directions régionales laissent les APE sous la main invisible des responsables d’établissement spolier nos populations ?  Les vrais parents d’élèvent vous répondront par la négative.

Nous sommes déjà en congés du premier trimestre dans un contexte de tension entre le MENA et la CNSE, notre souhait est que l’intérêt supérieur de l’enfant et la recherche d’une éducation de qualité soient mis au-devant afin que les choses évoluent positivement en 2019. Alors tout doit être mis en œuvre afin d’éviter le surgissement d’une situation désagréable liée à la mauvaise gestion des APE avec la complicité plus que affichée des proviseurs et directeurs d’établissements, sous votre regard, qui vont jusqu’à confisquer les documents scolaires des enfants pour non-paiement des cotisations spéciales et/ou ordinaires comme si les parents étaient obligés d’adhérer à l’APE qui, jusque-là reste une association régis par la loi 064-2015/CNT portant liberté d’association.

Tout en vous souhaitant une bonne et heureuse année 2019 et dans l’impatience de voir mon cri de cœur pris en compte au grand profit de l’éducation de nos enfants, recevez monsieur le directeur régional l’expression de ma plus grande considération.

BADJO  Bassirou

 Éducateur social

Parent d’élève                                                                                                                                                         elbach54@gmail.com

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