Dans l’univers des livreuses de Ouagadougou
Couramment appelé ‘’livreur’’, le métier de coursier a pris de l’ampleur au Burkina Faso, pays des Hommes intègres. Ce secteur d’activité très mobile est de plus en plus l’apanage de la gent féminine. Amandine Tondé, Alizéta Bamouni et Adèle Koussoubé sont toutes livreuses et cassent les codes et stéréotypes liés à ce métier qu’elles exercent à temps plein.
« Amandine, il y a un colis à livrer », « Allô, bonjour madame, je suis la livreuse, j’appelle pour avoir votre position », tel est le quotidien de Amandine Tondé, jeune livreuse âgée de 28ans.
Uniforme de travail, casque à la tête, chaussures fermées, Amandine Tondé, livreuse de colis à Ouagadougou, s’apprête à débuter une journée classique de travail. Il est 07h, la jeune fille est déjà à la ‘’base’’ ou encore le siège de la société qui l’emploie pour prendre connaissance de son programme de livraison du jour.
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Après quelques minutes d’échanges avec ses collègues et le responsable des livraisons, la jeune livreuse range les colis dans son sac de livraison et passe quelques coups de fil aux clients afin de se rassurer des lieux où les livraisons doivent être faites avant d’enfourcher sa moto. Direction : Yagma, un quartier situé en périphérie nord de la ville de Ouagadougou pour le premier colis.
Selon elle, l’envie de se lancer dans ce secteur est née du besoin pour elle de mieux connaitre la ville de Ouagadougou et de se faire parallèlement de l’argent. « J’ai été la plupart du temps à l’internat donc je ne connaissais pas la ville. Je mettais beaucoup de temps à retrouver certains endroits de la ville alors j’ai décidé de me lancer dans la livraison à temps plein. D’une part pour connaitre mieux la ville et d’autre part pour avoir de l’argent », confie-t-elle.
La livraison, une source de revenus pour les jeunes
Au quotidien la jeune fille récupère des colis à son agence ‘’Allô livreur’’ où elle travaille depuis bientôt deux mois qu’elle va livrer partout dans la ville. A l’en croire, elle peut faire plus d’une dizaine de livraisons par jour, souvent dans des zones à situations géographiques très opposées. Ce qui par moments impacte un peu l’heure des livraisons.
Comme Amandine Tondé, Alizeta Bamouni âgée de 24 ans est une jeune fille dynamique qui s’est lancée dans ce milieu masculin pour se faire de l’argent et mieux maîtriser la ville. « Étant dans la vente de savon, des couches pour bébés, il me fallait mieux connaître la ville de Ouagadougou et avoir de l’argent pour maintenir mon commerce », souligne Alizéta Bamouni.
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En neuf mois de service au sein de l’agence ‘’Allo livreur’’, la jeune femme est satisfaite de ses performances. Pour elle, elle arrive à gagner le nécessaire pour subvenir à ses besoins, maintenir son petit commerce et mieux découvrir la ville.
La jeune femme affirme avoir un revenu mensuel qui varie entre 75 000F et 85 000F en fonction du nombre de livraisons faites dans le mois. « Je rends grâce à Dieu pour ce que je gagne ici. J’arrive à prendre soin de moi, de ma famille et à mieux gérer mon commerce », dit-elle.
Alizéta travaille de 07h à 17h. Une fois les livraisons terminées, elle revient à la ‘’base’’ pour faire le point de sa journée au responsable avant de regagner sa famille pour ainsi se consacrer à son commerce. Elle essaie de donner le meilleur d’elle pour atteindre ses objectifs tout en espérant un jour trouver un travail stable et moins mobile.
« Il n’y a pas de métier spécifique aux hommes ni aux femmes »
Adèle Koussoubé, jeune étudiante en première année de Marketing et âgée de 23ans exerce le métier de livreuse à ses temps libres depuis maintenant 2ans. Selon la jeune fille en tant qu’étudiante elle désirait mener une activité à ses temps libres pour lui permettre d’avoir un revenu mensuel. C’est ainsi qu’elle a été recrutée par une agence de la place au poste de livreuse à temps partiel.
Sans expérience du domaine, la livreuse confie avoir bénéficié du soutien de son patron pour mieux s’en sortir dans ce domaine. « Je voulais un travail où j’allais appliquer un peu ce que j’apprenais en classe. Mes débuts n’étaient pas du tout faciles mais j’ai eu un responsable qui m’a fait confiance et m’a confié la livraison des colis qu’il recevait. Aujourd’hui ça va car il y a eu des progrès », fait-elle savoir.
Adèle travaille beaucoup Adèle travaille beaucoup plus les week-ends de 08h à 18h. Elle explique être libre les week-ends et profite de ce temps pour se faire de l’argent. Selon la jeune femme ce métier est ouvert à tous que l’on soit homme ou femme car il n’y a pas de métier spécifique aux hommes ni aux femmes. « Ce métier que l’on soit femme ou homme on peut bien s’en sortir, l’essentiel c’est d’avoir la volonté et des objectifs car ce sont les objectifs qui conduisent à la réussite », clame la livreuse avec ferveur.
« Les week-ends il y a trop de livraisons. Je peux faire 15 à 20 livraisons par jour. Je suis payée en fonction du nombre de livraisons effectuées par week-end. Cela me permet non seulement de subvenir à mes petits besoins et d’éviter de tendre la main à tout moment aux parents et de surtout découvrir la ville de Ouagadougou », confie-t-elle.
Appréciation et satisfaction
Le directeur général de Allô Livreur, Cyr Omer Lagou, d’estimer que les femmes sont plus rangées que les hommes. « Les femmes quand elles font un travail, elles le font plus correctement et plus minutieusement qu’un homme. Avec elles, il y a rarement de soucis de points », dit-il.
Aussi, le directeur affirme donner la même chance à tout le monde en recrutant autant de femmes que d’hommes car il est convaincu qu’il y a des femmes dynamiques qui ont envie de bouger. « J’ose croire que ce n’est pas toutes les femmes qui ont envie de rester dans un bureau et de travailler, il y a celles qui ont envie de bouger et si elles frappent à ma porte, je n’hésiterai pas à leur tendre la main », confie-t-il.
Sylasse Sawadogo, collègue de Amandine et Alizéta, ces deux femmes sont l’incarnation du courage et de la détermination. « Ces deux jeunes femmes me donnent l’envie de plus me battre pour réussir dans la vie. Elles sont très dynamiques et quand je vois ce qu’elles accomplissent comme travail chaque jour, je suis motivé pour travailler encore plus », affirme-t-il.
Quelques difficultés rencontrées
Dans ce domaine de la livraison, les trois femmes rencontrent pratiquement les mêmes difficultés que les hommes. Elles sont, pour la plupart du temps, négligées et injuriées par certains clients à cause du retard accusé dans la livraison du colis.
A en croire Alizéta, le retard accusé dans la livraison ne dépend pas souvent d’elles. Avec les embouteillages dans la circulation il est difficile de pouvoir être à l’heure pour une livraison. « Les clients se plaignent parfois des retards sans tenir compte de la circulation. Par exemple un client va demander une livraison de colis à Borgo en 15min alors que je suis peut-être allée livrer un colis à Cissin et il est difficile d’y être en 15min », insiste-t-elle.
A cela, s’ajoutent les difficultés morales telles que les moqueries et le rabaissement. En dehors de sa grande sœur, Adèle ne bénéficie pas de soutien de son entourage. « Certaines personnes se moquent de moi et ont tendance à me rabaisser surtout mes camarades de classe et le voisinage. Au début j’en pleurais mais avec le temps j’ai décidé de me focaliser sur mes objectifs », fait-elle savoir.
Ces jeunes livreuses de par leur dynamisme et leur courage forcent l’admiration et donnent l’envie à d’autres filles de se lancer dans ce milieu de la livraison au Burkina Faso.
Studio Yafa avec Mousso News