#InstantDiasporaBurkinabè : « L’avenir se trouve en Afrique », Namketa Savadogo
Communicatrice résident à New-York aux Etats-Unis, Namketa Savadogo est la promotrice de la société éponyme NS Consulting, une agence spécialisée dans le positionnement stratégique. La jeune et ambitieuse entrepreneure entend apporter des solutions innovantes et efficaces aux individus et aux entreprises.
- Présentez-vous à nos lecteurs
Je suis Namketa Jos Edith Savadogo, communicatrice, spécialisée dans la communication d’influence et les relations publiques. Je réside à New York aux États-Unis. Je travaille chez Adwanted Group, une entreprise de technologie pour le monde des médias et de la publicité. À côté, je suis consultante en marketing communication.
- Vous avez été formée pour être journaliste, pourquoi avoir décidé de vous tourner vers la communication d’influence ?
Je suis en effet diplômée en communication et médias. Je suis donc formée et apte à exercer en tant que journaliste. Cependant, j’ai toujours été fascinée par la psychologie humaine et les facteurs qui influencent les choix et les attitudes des foules. J’ai beaucoup été influencée par les travaux d’Edward Bernays sur la question. La communication d’influence n’est pas vraiment une discipline.
Elle rassemble tout ce qui est stratégie et des techniques de persuasion pour mobiliser les individus ou les groupes en vue d’atteindre des objectifs spécifiques. Elle s’applique dans divers contextes tels que la politique, les affaires, les relations publiques et le marketing.
Utilisée de manière éthique, la communication d’influence permet de promouvoir des causes justes et d’entraîner des changements positifs. Quant au journalisme, c’est un métier noble et sacré qui répond à des codes rigoureux. Informer le public de façon impartiale et honnête est un sacerdoce et ça me peine de voir certains amalgames.
- Avez-vous travaillé au Burkina ? Pendant combien de temps ?
Mon expérience professionnelle au Burkina Faso n’a pas été très exhaustive car je me suis envolée pour le pays de l’oncle Sam assez jeune. Néanmoins, pendant mes années universitaires, j’ai été commerciale dans une jeune ‘’boîte’’ de la place ainsi que gérante dans une compagnie pétrolière où j’ai appris la rigueur et la discipline au travail. Plus tard, j’ai fait des consultations en communications çà et là pour quelques entreprises et particuliers. Actuellement, les clients de NS consulting sont également au Burkina Faso.
- Vous êtes aux États-Unis depuis quelques années donc, comment s’est faite votre intégration aux États-Unis ?
Je suis arrivée aux États-Unis en 2014. Mon intégration aux États-Unis s’est bien déroulée dans l’ensemble. J’ai été accueillie chaleureusement et j’ai pu bénéficier de nombreuses opportunités d’apprentissage et de développement professionnel. Bien sûr, il y a toujours des défis liés à l’adaptation à une nouvelle culture et à un nouvel environnement, mais j’ai été soutenue par mes devanciers et ma détermination à réussir a toujours été un galvaniseur pendant les moments d’adversité.
- Existe-t-il de meilleures et réelles opportunités aux États-Unis qu’au Burkina Faso?
Il est difficile de comparer directement les opportunités entre les États-Unis et le Burkina Faso, car ce sont deux contextes très différents. Tout dépend des objectifs et du profil de la personne qui immigre.
Les États-Unis offrent de vastes opportunités dans tous les domaines, mais il serait malhonnête de ne pas reconnaître les défis à relever. Pour réussir, il faut faire preuve de courage, de patience et ne jamais perdre de vue ses objectifs. En tant que noir et immigrant, il est crucial de rechercher activement les opportunités plutôt que de se contenter de ce qui se présente à nous. Pour un professionnel déjà senior dans sa carrière, immigrer c’est se mettre en retard.
J’estime que l’avenir se trouve en Afrique. Le Burkina Faso est un chantier en construction, ce qui permet facilement l’innovation, si bien sûr nous arrivons à une gouvernance sérieuse qui met le développement au centre de nos politiques.
- Qu’est-ce qui a inspiré la création de NS Consulting ?
J’ai fondé NS consulting dans le but de répondre à une demande spécifique : celle d’optimiser le positionnement des individus et des entreprises. Je suis partie d’un simple constat : qu’il s’agisse d’une entreprise cherchant à maximiser sa croissance, d’un professionnel en quête de progression professionnelle ou d’une personnalité publique désirant une image plus favorable, le simple talent et potentiel ne suffisent plus.
Se démarquer de la foule requiert une méthodologie scientifique et rigoureuse impliquant l’élaboration d’une stratégie bien étayée afin de mettre en valeur vos atouts. Notre offre de services inclut la communication politique, la gestion de crise, le personal and corporate branding, les relations publiques, le conseil en image ainsi que le marketing.
- Dans vos écrits, vous semblez déplorer la gestion de la communication en temps de crise de nos entreprises. Qu’est-ce qui doit être amélioré ?
Tout d’abord, il est crucial de confier cette responsabilité à des professionnels compétents. Il est regrettable de constater qu’il y a souvent un manque de professionnalisme et beaucoup de tâtonnement dans ce domaine au sein de nos institutions.
Du jour au lendemain, certains s’autoproclament communicateurs. Et souvent, les actions de communication sont menées de façon spontanée. Nos structures doivent mettre en place une stratégie de communication préventive, en anticipant les potentielles crises et en se préparant en conséquence. Les entreprises doivent également s’adapter rapidement aux canaux de communication émergents et aux exigences changeantes du public.
- Vous étiez l’une des meilleures et virulentes chroniqueuses de l’émission à succès Le Grand Café. Parlez-nous de cette expérience.
C’était un privilège et une expérience extrêmement enrichissante pour moi de faire partie de l’équipe de chroniqueurs du « Grand Café ». J’ai eu l’opportunité de partager mes idées et mes opinions sur des sujets de société et de faire de belles rencontres. J’ai toujours été passionnée par le micro et la télévision.
Le Grand Café m’a permis de me mettre au défi dans ce rôle de chroniqueuse. Au début, ce n’était pas évident d’être dans cette position où je devais titiller et poser des questions inconfortables à des invités, certains pour lesquels j’ai une grande admiration et un profond respect.
Mais c’est tout cela qui agrémente la discussion, et cela a été un temps d’apprentissage et d’adaptation. Je salue le commandant Papus au passage, ainsi que tous mes collaborateurs, pour les bons moments partagés.
- Fréquentez-vous la communauté burkinabè dans ce pays ?
Il est important pour moi de rester connectée à mes racines et de rester en contact avec mes compatriotes vivant à New York. J’ai retrouvé une deuxième famille burkinabè ici, qui m’a beaucoup soutenue dès mon arrivée. Nous organisons régulièrement des événements culturels et des rencontres pour renforcer les liens au sein de la communauté. Je participe activement aux activités de certaines ONG qui soutiennent la communauté burkinabè.
- Comptez-vous revenir au pays ?
Je suis attachée au Burkina Faso et je crois en son avenir. Je reste convaincue que nous avons tous notre part à jouer pour son développement. Étant ici, j’entreprends déjà plusieurs activités au Burkina et je n’ai pas de doute que c’est là où j’élirai domicile au moment propice.
- Quels sont les défis majeurs de la jeunesse burkinabè dans un tel contexte sécuritaire ?
L’insécurité a des répercussions sur l’accès à l’éducation, à l’emploi et aux opportunités économiques, et génère également un sentiment d’incertitude. Il est crucial de lutter contre le terrorisme tout en prenant des mesures pour offrir des perspectives d’avenir aux jeunes. Cela passe par la formation professionnelle, la redynamisation du secteur privé et la promotion des investissements. Bien sûr, la lutte contre le terrorisme reste une priorité, mais il est tout aussi important de se concentrer sur les perspectives de développement, car cela va de pair. La misère et le désespoir nourrissent le terrorisme. Malgré ces défis, nous assistons à une jeunesse de plus en plus audacieuse, avec une montée en puissance de l’entrepreneuriat et du leadership. Nous devons assumer notre rôle et oser rêver grand dans un monde où l’innovation ne connaît pas de limites.
- Quel est votre regard sur le mariage en Afrique pour les femmes quand on sait la pression qu’on les exerce parfois ?
Le mariage reste une institution sacrée en Afrique. Aux yeux de nos cultures et de nos religions, il représente un symbole d’engagement, de stabilité et d’équilibre.
Je suis convaincue que la quasi-totalité des femmes aspirent à trouver la bonne personne et à fonder ensemble un foyer paisible. Cependant, la pression exercée sur les femmes peut parfois être excessive et nuisible. Cette pression sociale peut entraîner des conséquences néfastes, poussant certaines femmes à accepter les pires humiliations et abus pour répondre aux attentes de la société au détriment de leur épanouissement et même de leur vie.
Il est important de promouvoir l’éducation et l’autonomisation des femmes, afin qu’elles soient en mesure de faire des choix éclairés et de construire des relations basées sur le respect mutuel.
- Êtes-vous féministe ou féodale ? Pourquoi ?
Je ne suis ni féministe ni féodale. Je suis attachée à la défense des droits des femmes, à l’égalité des chances et des opportunités. Cependant, je ne me retrouve pas dans le féminisme contemporain qui manque parfois de l’intersectionnalité et de contextualité. On a l’impression qu’il tend à devenir une dictature de la pensée unique, cherchant une définition rigide de ce qu’est une femme « moderne et émancipée ».
Je reste également attachée à notre culture africaine et je suis convaincue que les femmes africaines occupaient une place de choix dans la société. Je crois que nous pouvons puiser des éléments positifs dans nos traditions pour reconstruire un certain équilibre.
Cependant, je réaffirme mon engagement envers les droits des femmes et je me distancie de tout ce qui encourage leur asservissement. Je crois en une approche équilibrée qui valorise la diversité des parcours et des choix individuels, tout en luttant contre les discriminations et les inégalités de genre.
- Un message mot à l’endroit de vos frères et sœurs Burkinabè?
Je souhaite adresser un message de paix et d’espoir à mon cher pays, le Burkina Faso. Malgré les défis sécuritaires, nous avons la capacité de surmonter ces épreuves. À la jeunesse Burkinabè, je vous encourage à rester audacieux, à poursuivre vos rêves et à devenir les agents du changement dont notre pays a besoin. Saisissez les opportunités qui se présentent, investissez dans votre éducation et travaillez ensemble pour bâtir un avenir meilleur pour tous.
Je saisis également cette occasion pour remercier Mousso News de m’avoir donné l’opportunité de m’exprimer. Merci de donner une voix aux femmes. Je vous souhaite beaucoup de succès dans cette noble mission.
Interview réalisée en ligne par Clémentine MIDIOUR