Madinatou Rouamba (Fatih Karragümrük/D1 Turquie) : « On peut bien jouer au football et fonder un foyer »

Après deux saisons dans le championnat féminin turc de première division, Madinatou Rouamba est en fin de contrat avec Fatih Karragümrük. En attendant un probable renouvellement, la défenseure centrale dresse un bilan, revient sur son adaptation, ses objectifs et sa prochaine destination…

Comment se porte Madinatou Rouamba ?

Après avoir bouclé une saison en bonne santé, atteindre les objectifs personnels et ceux du club, je ne peux que me porter bien.

Quel bilan dresses-tu de ta saison ?

Je dirais une bonne saison comparativement à celle écoulée où je n’avais pas trop de temps de jeu. Et comme je n’aime pas regarder les autres jouer, j’ai redoublé d’effort dans le travail individuel. Et c’est d’ailleurs ce qui m’a permis de m’imposer cette saison comme titulaire en défense. La concurrence est très rude à Fatih Karragümrük. Donc, en plus des entrainements collectifs, il faut trouver du temps pour le travail individuel. Quant au bilan du club, nous avons terminé 7e sur 15. Il est vrai que nous avons dégringolé au classement comparativement à la saison passée, mais nous avons reçu les félicitations de nos dirigeants parce que ce n’était pas très évident.

Comment a été ton adaptation en Turquie ?

Ce n’était pas facile au cours de la première saison, surtout avec la barrière linguistique. Je viens d’un pays francophone et je n’étais pas la seule dans ce cas à Fatih Karragümrük où nous avons aussi une malienne, une ivoirienne et une camerounaise. En Turquie, on parle anglais et arabe. Pour cela, le club nous a trouvé un guide qui sert en même temps d’interprète. Au début, ce n’était pas facile. Mais avec le temps, je me suis habitué et j’arrive à me débrouiller toute seule. C’est un peuple très accueillant et ouvert. Avec les autres coéquipières africaines, j’ai une très bonne entente. On se retrouve tant qu’on peut et on se donne des conseils.  Il faut rappeler qu’en plus de la barrière linguistique, j’ai été confrontée à un problème de climat. Je n’étais pas habituée à un tel froid. Mais finalement, je me suis habituée.

Y’a-t-il d’autres joueuses burkinabè dans le championnat truc ? Si Oui, quelles sont vos relations ?

Si. Nous avons Juliette Nana qui évolue avec Ahmed SK (Ligue 3) et Balkissa Sawadogo qui est sociétaire de Antalyasport (Ligue 1). Avec mes deux ainées, nous entretenons de très bonnes relations. Et cela n’a pas commencé en Turquie. Depuis l’équipe nationale, nous sommes une véritable famille. Et depuis lors, nous échangeons régulièrement.

Comment trouves-tu le championnat turc ?

Le championnat turc a un bon niveau. Il regorge beaucoup de talents. Aussi, il a une bonne organisation. Les supporters trouvent toujours du temps pour venir soutenir leurs équipes. Ce n’est pas comme chez nous où les gradins sont quasi vides lors des matchs. En Turquie, le football féminin est valorisé.

Quels sont tes objectifs avec Fatih Karragümrük ?

Avec Fatih Karragümrük, je suis en fin de contrat parce que j’avais signé deux ans. Néanmoins, nous sommes en pourparlers pour un probable renouvellement. Mais en attendant, j’ai d’autres propositions.  Je suis très ambitieuse.  Je veux aller encore plus loin. Je veux découvrir d’autres grands clubs comme le FC Barcelone, le PSG ou encore l’olympique lyonnais.

Madinatou Rouamba est l’une des rares joueuses qui se maquillent avant de disputer un match. Pourquoi ?

J’aime me faire belle. Je l’ai toujours aimé, depuis que j’étais petite. Donc, je n’ai pas voulu déroger à cette règle même quand il faut disputer un match. Ce n’est pas parce qu’on doit jouer un match qu’on ne doit pas se faire belle. Je me sens à l’aise quand je me maquille. Cela me donne une autre force sur la pelouse.

Lire aussi : https://www.moussonews.com/sport-veronique-zorome-yonli-une-des-pionnieres-en-entrainement-de-football-feminin/

Pourquoi on te surnomme la miss ?

C’est une histoire qui a commencé depuis que j’étais petite. Avec ma forme, je m’adonnais à imiter la démarche des miss. Dans les concours de miss à l’école et dans le quartier, je m’en sortais bien. Et depuis lors, on m’a surnommé la miss. Et ce surnom m’a suivi jusqu’au football.

Est-ce que le fait de jouer au football ne réduit pas les chances de se marier ?

Non pas du tout. On peut bien jouer au football et fonder un foyer. La pratique du football n’enlève en rien la féminité d’une joueuse. C’est généralement dans les pays où la pratique du football féminin n’est pas encore acceptée que l’on continue à penser que la pratique peut réduire les chances de se marier. C’est une question de mentalité. Sinon en Europe, elles sont nombreuses les joueuses qui se sont mariées, donné naissance à des enfants et qui continuent de jouer au football.

Depuis deux saisons, tu vis une carrière professionnelle. Quels conseils peux-tu donner aux parents qui refusent toujours de voir leurs filles jouer au football ?

Je pense que la mentalité est en train de changer petit à petit dans nos contrées. Depuis notre participation à la CAN au Maroc, beaucoup de parents commencent à comprendre. De plus en plus, elles sont nombreuses sur les terrains de football. C’est déjà un bon signe. Contrairement à beaucoup d’autres filles, j’ai eu la chance d’être accompagnée par mes parents à mes débuts. Aujourd’hui, c’est le tour de ma sœur cadette d’en bénéficier. Elle a figuré sur la liste des Etalons dames U17 qui a affronté le Nigeria dans le cadre des éliminatoires de la coupe du monde. C’est pour dire que les parents doivent accompagner leurs filles afin qu’elles puissent vivre leur passion.

Le Burkina Faso est éliminé à la porte de sa 2e qualification pour une CAN par l’Afrique du Sud. Selon toi, qu’est-ce qui explique cette élimination ?

L’Afrique du Sud était un gros morceau. C’est l’une des meilleures équipes africaines pour ne pas dire la meilleure parce qu’elle est la championne en titre. Malgré son rang, nous n’avons pas été ridicule. Nous avons inquiété cette formation lors de la double confrontation. Notre problème n’est pas sur le terrain. Le football féminin au Burkina doit bénéficier d’un autre regard.  Nous ne pouvons pas nous comparer aux hommes. Mais, nous avons besoin d’un minimum de conditions pour pouvoir titiller les grandes nations de football.

ITW réalisée par Ollo Aimé Césaire HIEN

Source : Les éditions Sidwaya

Loading

Partagez

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *