
Port du Faso Danfani : des acteurs du monde éducatif s’interrogent

Le gouvernement a adopté un décret portant institution du Faso danfani comme tenue scolaire le 9 août 2023 en conseil des ministres. Sur cette mesure qui va s’appliquer à compter de la rentrée 2023-2024, les avis des élèves, responsables d’école, couturiers et autres citoyens divergent.
Les élèves seront vêtus aux couleurs des pagnes traditionnels tissés au Burkina Faso durant cette année scolaire. A cet effet, la question de l’effectivité du port du Faso danfani se pose.
Des responsables de lycées et collèges louent cette initiative du gouvernement, mais certains redoutent l’application effective. Christophe Kinda, Fondateur du groupe scolaire Sainte Tabitha Dorcas, trouve idéal que les Burkinabè consomment ce qu’ils produisent et produisent ce qu’ils consomment.
« D’ores et déjà, les élèves peuvent commencer à porter leurs tenues en Faso danfani cette année. Néanmoins, ceux qui n’en disposeront pas ne seront pas chasser hors des salles de classes », dit-il.
Il poursuit en indiquant que le gouvernement a voulu cette application flexible et non contraignante. Raison pour laquelle l’obligation de la mesure du port de la tenue scolaire en Faso-danfani a été prorogée à la rentrée 2026-2027.
L’expérimentation de la tenue scolaire en Faso danfani sera d’abord conduite dans trois communes urbaines et une commune rurale, à savoir Ouagadougou, Bobo-Dioulasso, Koudougou et Sabou.
Des élèves louent l’initiative
Le port du Faso Danfani débutera avec les élèves du post-primaire et du secondaire des établissements publiques et privés. Certains élèves ne s’opposent pas à cette décision mais craignent les périodes de forte chaleur. « Je ne trouve aucun inconvénient à porter le Faso danfani. Cependant si la matière du pagne n’est pas légère, pendant la période d’avril, mai et juin, nous pourrons nous étouffer surtout qu’il n’y a pas de brasseur et climatiseur dans toutes les écoles », indique Rachida Balima, élève en classe de 2nde.
Philémon Compaoré, élève en classe de CM1, quant à lui apprécie cette décision. Pour lui, elle est la bienvenue et aidera les élèves à moins se salir. « Si nous devons porter du Faso danfani, nous n’allons plus trop salir nos tenues scolaires et nos mamans ne vont plus trop nous gronder. Comme le pagne est lourd à laver et sèche difficilement, nous serons obligés d’en prendre soins et de moins les salir », laisse-t-il entendre
Des parents d’élèves s’interrogent sur le prix
Au regard de la cherté de la vie, les parents d’élèves redoutent le prix, la qualité du pagne Faso danfani. « Nous serons fières de voir nos enfants porter des vêtements que nous avons tisés et conçus au Burkina Faso. Néanmoins, j’espère que le prix sera abordable et que la tenue résistante », affirme Noélie Compaoré, parente d’élève.
A en croire Richard Malo, parent d’élève le coût de Faso danfani risque d’être un problème pour eux. « Il faudra véritablement que le prix de ces pagnes soient accessibles à tous. Avec ce que nous déboursons pour les fournitures et les scolarités si les pagnes vont coûter chers, on ne s’en sortira pas », confie-t-il.
Les couturiers espèrent des pagnes bien tissés
Pour que ces tenues soient résistantes, certains couturiers estiment que le ralliement des files en coton et la teinture doit être bien faite. « Souvent, je reçois des pagnes Faso danfani et lors de la coupure du pagne pour la couture, les files de coton se détachent. J’essaie tout de même d’avoir un bon rendu, mais le vêtement n’a généralement pas une longue durée. Il peut subir une déchirure précoce », relève Ciseau d’or, couturier.
Comme Ciseau d’or, Thérèse Ouédraogo, couturière depuis 20 ans, espère que les pagnes fabriqués seront de bonne qualité. « Je ne suis pas contre l’utilisation du Faso danfani comme tenue scolaire, mais je crains pour la qualité des pagnes. De nos jours, il y a beaucoup trop de pagnes mal tissés sur le marché », fait-elle savoir.
La texture du pagne, les couleurs, les motifs sont laissés au libre choix des établissements en concertation avec les parents d’élèves. Ainsi la Fédération nationale des tisseuses du Burkina (FENATI/BF) s’inquiète de la multitude de motifs comme uniformes scolaires. Selon elle, cette multitude de motifs exposent à la contrefaçon, à la diversité ou les surenchères des prix des pagnes. La FENATI/BF suggère donc le choix d’un motif unique ou un motif par localité pour l’harmonisation du prix des pagnes Faso danfani sur le marché.
Reine Bénédicte Kinda/stagiaire