Vivre en grande famille : une expérience souvent ‘’amère’’ pour certaines femmes

De moins en moins de jeunes couples mariés désirent vivre en grande famille au Burkina. Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce phénomène qui constitue un handicap pour l’épanouissement de ces foyers.

Dans les grandes familles, généralement composées de plusieurs générations sous le même toit, la cohabitation implique une gestion minutieuse des espaces et des relations. Dès le levé du soleil, la cour bourdonne d’activités et de voix.

Jokebed Dabilgou, mariée depuis 3 ans et mère de 4 enfants, éprouve une vive douleur quant on aborde sa vie de couple. Chaque jour qu’elle y passe est la prolongation d’un supplice sans fin.

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Son expérience aussi sensible que douloureuse l’affecte au quotidien. « Si j’avais su plutôt que vivre dans la grande famille de mon époux allait être source de stresse, jamais je n’aurais accepté ce mariage. Personne ne répond quand je salue et même mon repas, on ne mange pas. Impossible pour mon époux de me faire plaisir sans que les ‘’inspecteurs Colombo’’ (beaux-parents) ne réclament leur part », explique-t-elle avec beaucoup de regrets.

C’est aussi le cas de Sita Compaoré, mère de jumelles qui est l’ombre d’elle-même en grande famille. En effet la jeune femme mariée depuis 5 ans souffre le martyr dans sa nouvelle famille. « Mon mari est le plus aimé de sa maman et ne lui refuse rien. Depuis que j’ai aménagé dans leur domicile, les mésententes ne font que s’accumuler de jour en jour. Je reconnais que nul n’est parfait alors je fais de mon mieux pour éviter les problèmes. Les frères de mon époux ont toujours été contre notre union et me rendent la vie pénible », laisse-t-elle entendre après un gros soupir.

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La gestion de l’intimité, une affaire délicate

L’intimité dans un couple est capitale. Pourtant celle d’un couple vivant en grande famille est très compliquée. Selon Safoura Tiendrébéogo, mère de 3 enfants avoir une vie intime ‘’normale’’ relève du parcours du combattant. « Tout le monde rentre chez tout le monde de jour comme de nuit. L’intimité personnelle est souvent sacrifiée au nom du bien-être familial. Notre chambre est notre seul refuge, mais même là, nous faisons très attention aux oreilles et aux regards curieux qui peuvent percevoir chacune de nos discussions ou de nos moments d’intimité », raconte-t-elle.

Tout comme elle, trouver des moments à deux devient une tâche minutieuse pour Ella Ouattara. Les moments d’affection et de communication privée doivent être soigneusement planifiés pour éviter toute intrusion volontaire ou involontaire. « Un jour, après une belle soirée romantique avec mon époux on est rentré emporté par le feu de l’action, nous avons juste rabattu la porte de notre maison. Ma belle-mère qui avait l’habitude de rentrer sans taper est rentrée et a vu ce qu’elle voulait voir. », explique-t-elle avec air moqueur.

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En plus de ces difficultés, l’éducation des enfants, la gestion des finances constituent aussi un autre fardeau pour ces femmes. « Je ne peux pas me plaindre quand une coépouse ou un membre de la famille s’en prend à mes enfants car ils appartiennent à tout le monde. Souvent j’assiste impuissante pour après les consoler. », relate Jokebed. Et d’ajouter que « les mésententes entre coépouses à cause des enfants ne manquent pas dans les grandes familles ».

Pour Ella, la gestion des finances est très complexe entre les dépenses communes et personnelles. « En tant que jeune couple nous devons contribuer aux dépenses communes et préserver nos propres objectifs financiers. Nous participons aux frais alimentaires et aux dépenses générales de la maison, mais nous devons aussi économiser pour notre avenir. Cela demande beaucoup de communication avec les autres membres de la famille pour éviter les tensions ».

Malgré les difficultés inhérentes, chacune de ces femmes aspire à avoir sa propre maison et à disposer de son espace pour une meilleure gestion de leur foyer.

Mireille Sandrine Bado/MoussoNews