Yéri Kambou exporte son expertise du tchapalo en Côte d’ivoire
Yéri Kambou est une vendeuse à succès de dolo en terre ivoirienne. Cette bière traditionnelle à base de céréales comme le sorgho est le business de la native du Burkina. Dans la commune de Port-bouët, ses cabarets qui emploient une vingtaine de personnes sont bien connus. Avec ses 45 ans d’expérience dans la préparation du tchapalo, elle crée des emplois et engrange des revenus.
Abidjan, capitale économique de la Côte d’Ivoire. Commune de Port-Bouët, quartier Adjouffou. C’est là Yéri Kambou a construit sa renommée dans la préparation et la vente du tchapalo ou dolo. Alors qu’elle arrive en terre ivoirienne pour rejoindre son mari, elle prend le risque de continuer ce commerce qu’elle faisait déjà dans son pays d’origine.
Il est 15h. Yéri Kambou, 55 ans arrive dans son bureau ou du moins son cabaret. Elle est vêtue d’un complet pagne qui fait ressortir son teint brillant noir. La mère de 11 enfants affiche un sourire permanent. Si elle est arrivée dans l’après-midi, la journée de travail, elle, a débuté un peu plus tôt. Déjà sur pied à 4 h du matin, elle lave les bancs qui servent de siège pour les clients. Puis, elle contrôle minutieusement les alentours de son cabaret pour s’assurer de la propreté des lieux avant l’arrivée des premiers clients.
« Certains clients passent très tôt le matin prendre une calebasse de dolo avant le boulot, c’est pratiquement un rituel pour eux », nous apprend celle qui est affectueusement appelée ‘’Iman’’.
Un héritage maternel et culturel
Depuis 45 ans Yéri Kambou est dans la préparation du dolo. Elle avoue avoir commencé très jeune. « J’ai débuté cette activité lorsque j’avais 10 ans car j’assistais ma mère qui l’a héritée de ma grande mère. Le dolo est le principal héritage qu’elle nous a légué », dit-elle avec un sourire qui laisse transparaitre sa fierté. Un héritage qu’elle transmet progressivement à sa fille Blandine, 19 ans.
Il faut dire que le dolo est un élément culturel en pays lobi où la femme est tenue d’en connaitre la préparation. La transmission est donc générationnelle.
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Au-delà de la touche culturelle, le tchapalo est surtout un business pour Yéri. Avec un cabaret au départ, elle a dû ouvrir un deuxième au regard du succès de l’activité. Ce sont dix collaboratrices dont cinq dans chaque cabaret, qui se relaient et s’entraident dans la fabrication de la bière de mil.
Parmi les femmes qui travaillent à ses côtés, Stéphanie Midiour. « J’ai 30ans et je travaille avec Iman ça fait 10 ans. C’est une femme d’une extrême générosité et rigoureuse », dit la jeune dame, le regard admiratif sur sa patronne.
Bien que ne travaillant plus avec la dolotière, Cynthia Tioyé retient de son ancienne patronne, l’image d’une dame « méthodique » et rigoureuse dans son travail.
Ambiance arrosée au quotidien
Il est 16h et le cabaret de Yéri Kambou ne se désemplit pas. Les tables sont toutes occupées. Les causeries des clients animent les lieux. Entre deux rasades, Souleymane Kouassi explique être un client fidèle du cabaret depuis 2006. « J’aime le dolo de la vieille Iman car il a une belle texture et c’est très bon sans compter le cadre qui est très propre », dit-il. Et ce n’est pas tout. « En plus, il soigne mon palu », ajoute-t-il, avec humour qui arrache le sourire autour de lui.
Enseignant de profession, Laurent Ouattara est également coutumier des lieux depuis 2017, car note-t-il : « Je trouve son dolo fort, souvent donc je bois à ma descente afin de mieux dormir ».
Il y a ceux qui viennent déguster sur place la bière de mil, mais il y a également d’autres clients qui jouent la carte de la discrétion. Loin des regards indiscrets, Yvette Poda aide-vendeuse renverse un litre de dolo dans un bidon couvert d’un sachet noir et remis à un enfant. « Ce dolo est pour tantine Rosa, elle aime notre dolo mais préfère se cacher car son époux estime qu’une femme ne devrait pas prendre une boisson alcoolisée », nous confie-t-elle.
Une activité impactée par la crise sécuritaire
Le commerce du tchapalo nourrit de nombreuses femmes. C’est une activité qui permet à des familles de vivre dignement. « J’ai aidé mon époux à scolariser tous nos enfants avec ce que je gagne dans la fabrication et la vente du dolo. Aujourd’hui j’ai deux cabarets qui me rapportent au moins 150.000F CFA par mois » explique fièrement Yeri Kambou.
Par contre, la situation sécuritaire du Burkina Faso menace la pérennité et la rentabilité du commerce de dolo Selon Yéri Kambou. Le prix de la matière première qu’elle faisait venir de son pays d’origine a connu une hausse considérable. Le sac du sorgho est passé de 23.000 F CFA à 40.000F CFA voire 45.000F CFA.
Bien que loin du Burkina, Yéri Kambou espère chaque jour le rétablissement de la sécurité dans son pays.
Studio Yafa avec Mousso News